« Jadis notre nature n'était pas ce qu'elle est
actuellement. D'abord il y avait trois espèces d'hommes, et non deux comme aujourd'hui
: le mâle, la femelle, et en plus de ces deux-là, une troisième composée des
deux autres ; le nom seul en reste aujourd'hui, l'espèce a disparu. C’était
l'espèce androgyne qui avait la forme et le nom des deux autres, dont elle
était formée. De plus chaque homme était de forme ronde sur une seule tête,
quatre oreilles, deux organes de la génération, et tout le reste à l'avenant.
[...]
Ils étaient aussi d'une force et d'une vigueur
extraordinaire, et comme ils étaient d'un grand courage, ils attaquèrent les
dieux et [...] tentèrent d'escalader le ciel [...] Alors Zeus délibéra avec les
autres dieux sur le parti à prendre. Le cas était embarrassant ; ils ne
pouvaient se décider à tuer les hommes et à détruire la race humaine à coups de
tonnerre, comme ils avaient tué les géants ; car c'était mettre fin aux
hommages et au culte que les hommes leur rendaient ; d'un autre côté, ils ne
pouvaient plus tolérer leur impudence.
Enfin, Zeus ayant trouvé, non sans difficulté,
une solution, [...] il coupa les hommes en deux. Or, quand le corps eut été
ainsi divisé, chacun, regrettant sa
moitié, allait à elle ; et s'embrassant et s'enlaçant les uns les autres
avec le désir de se fondre ensemble [...]
C'est de ce moment que date l'amour inné des
êtres humains les uns pour les autres : l'amour recompose l'ancienne nature,
s'efforce de fondre deux êtres en un seul, et de guérir la nature humaine. [...] Notre espèce ne saurait être heureuse
qu'à une condition, c'est de réaliser son désir amoureux, de rencontrer
chacun l'être qui est notre moitié, et de revenir ainsi à notre nature
première. »
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