Monday, 29 September 2014

Nietzsche



Nous en sommes à la phase où le conscient devient modeste. En dernière analyse, nous ne comprenons le moi conscient lui-même que comme un instrument au service de cet intellect supérieur, qui voit tout d'ensemble: et nous pouvons alors nous demander si tout vouloir conscient, toute fin consciente, tout jugement de valeur  ne seraient pas de simples moyens destinés à attendre quelque chose d'essentiellement différent de ce qui nous apparaissait à la lumière de la conscience. Nous croyons qu'il s'agit de notre plaisir ou de notre douleur, mais le plaisir et la douleur pourraient être des moyens grâce auxquels nous devrions accomplir des opérations étrangères à notre conscience. - Il faudra montrer à quel point tout ce qui est conscient demeure superficiel, à quel point l'action diffère de l'image de l'action, combien nous savons peu de ce qui précède l'action; combien chimériques sont nos intuitions d'une "volonté libre", de "cause et d'effet"; comment les pensées, les images et les mots ne sont que les signes des pensées, à quel point toute action est impénétrable; combien l'éloge et le blâme demeurent superficiels; comment notre vie consciente se passe essentiellement dans un monde de notre invention et de notre imagination; comment nous ne parlons jamais que de nos inventions (nos émotions même) et comment la cohésion de l'humanité repose sur la transmission et la perpétuité de ces inventions;
[ … ]Le vouloir, les fins, les pensées, les valeurs existent-ils réelle ment? Toute la vie consciente ne serait-elle qu'un reflet capté dans un miroir? Et même quand il semble que c'est un jugement de valeur qui détermine un homme, ce qui se passe, au fond, est tout différent. Bref, à supposer qu'on arrive à expliquer l'apparente finalité dans l'action de la nature sans admettre que les fins fussent prescrites par un moi, notre propre finalité consciente, notre volonté, etc., ne pourraient-elles pas n'être qu'un langage chiffré pour désigner une réalité toute différente, involontaire et inconsciente - l'aspect le plus subtil de cette finalité naturelle du monde organique, mais rien qui en fût différent?

 Friedrich Nietzsche   La Volonté de puissance

Travail préparatoire :
1)      Fiche de lecture du texte
2)      Répondre aux questions suivantes :


Q1: Qu’est-ce que la modestie ? Nietzsche considère qu‘il vit l’époque où « le conscient devient modeste. »  Expliquez la phrase. Qu’est-ce qui caractérise cette époque ou cette « phase » ? En quoi s’oppose-t-elle aux époques antérieures ? Pouvez-vous donner des exemples d’immodestie ou de prétention de la conscience ?

Q2 : Quel est le lien entre la modestie de la conscience et le fait de n’être qu’un « instrument » ?
L’idée d’un « intellect supérieur, qui voit tout d'ensemble » vous semble-t-elle claire ? Obscure ? Pour quelle raison ?

Q3 : Quelles sont les différentes activités de la conscience énumérées à la ligne 3 et 4 ?

Q4 : « tout ce qui est conscient demeure superficiel ». Expliquez la phrase et illustrez.



Q5 « Nous croyons qu'il s'agit de notre plaisir ou de notre douleur » : que signifie ici le mot croyance ? Pourquoi Nietzsche le souligne-t-il ? Qu’est-ce que cela révèle au sujet de la conscience ?

Q6 : Etes-vous capables d’illustrer chaque expression de la ligne 8 à 12 ? Que signifie le mot chimérique ?

Q7 : « comment notre vie consciente se passe essentiellement dans un monde de notre invention et de notre imagination; ». Quelles sont les deux facultés présentées dans ce passage ? Nietzsche les distingue-t-il ou les confond-il ? Pour quelle raison ?

Q8: Nietzsche évoque  le concept de nature dans le dernier paragraphe. Pouvez-vous éclaircir les liens qui peuvent exister entre nature et conscience ? Le philosophe doit-il tenir compte de cette idée de « nature » ou l’ignorer ?

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