« Le je pense doit nécessairement pouvoir accompagner toutes mes
représentations ; car, si tel n'était pas le cas, quelque chose serait
représenté en moi qui ne pourrait aucunement être pensé - ce qui
équivaut à dire que la représentation ou bien serait impossible, ou bien
ne serait du moins rien pour moi. La représentation qui peut être
donnée avant toute pensée s'appelle intuition. Donc tout le divers de
l'intuition entretient une relation au « je pense » dans le même sujet
où ce divers se rencontre. Mais cette représentation ( je pense ) est un
acte de la spontanéité, c'est à dire qu'elle ne peut pas être
considérée comme appartenant à la sensibilité. Je l'appelle aperception
pure pour la distinguer de l'aperception empirique, ou encore
l'aperception originaire, parce qu'elle est cette conscience de soi qui,
en produisant la représentation « je pense » laquelle doit pouvoir
accompagner toutes les autres et est une et identique dans toute
conscience, ne peut être accompagnée d'aucune autre. Je nomme encore
l'unité de cette représentation l'unité transcendantale de la conscience
de soi, pour désigner la possibilité de la connaissance a priori qui en
procède. Car les diverses représentations, qui sont données dans une
certaine intuition, ne constitueraient pas toutes ensemble mes
représentations, si elles n'appartenaient toutes à une conscience de
soi, ce qui veut dire qu'en tant qu'elles sont mes représentations (
bien que je n'en aie pas conscience sous cette forme ) , elles doivent
en tout cas, avec nécessité, se conformer à la condition sous laquelle
seule elles peuvent se réunir dans une conscience générale de soi, étant
donné que, sinon, elles ne m'appartiendraient pas complètement. »
Kant. Critique de la Raison Pure
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